Quels sont les codes graphiques du manga ?

Par le 14 août 2020

Comme les webtoons, les mangas possèdent des codes graphiques bien à eux. Si à ses débuts, le manga moderne trouve son inspiration dans les dessins animés Disney et les comics américains, il est aujourd’hui caractérisé par des éléments qui lui sont propres. C’est à ça qu’on l’identifie et c’est en respectant ces codes graphiques que le manga sera considéré comme un « manga » – et non une BD ou un « comic book« .

Couleur, décors et sens de lecture

Avant toute chose, le manga est caractérisé par un sens de lecture de droite à gauche (traditionnel au Japon, souvent conservé par les éditeurs français) et des dessins en noir et blanc. Cette deuxième spécificité s’explique par les restrictives budgétaires qui touchent le pays à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Afin d’économiser, les maisons d’édition prennent la décision d’imprimer leurs planches en noir et blanc. Pour pallier à cette contrainte, les mangakas développent de nouvelles techniques de dessin (perspective, jeu d’ombre et de lumière…) en travaillant sur leurs nuances de gris. Le succès que certains noms rencontrent à cette époque – malgré l’absence de couleurs – convainc les éditeurs de conserver ce choix graphique, qui fait d’ailleurs aujourd’hui partie intégrante de l’identité du manga.

Outre ces deux caractéristiques principales, le manga possède aussi son propre système de publication, souvent divisé en deux parties. D’abord, il paraît dans un magazine spécialisé (Weekly Shōnen Jump en est sans doute l’exemple le plus connu). S’il rencontre un succès suffisant, il sera ensuite relié en volumes (tankōbon). En France, les mangas sont directement publiés sous forme de tankōbon.

Weekly Young Jump, un autre magazine de prépublication

Ce système de publication explique pourquoi les premiers tomes d’un manga ont souvent des cases avec un fond blanc. En effet, le rythme de travail des mangakas ne leur laisse que peu de temps à consacrer aux arrière-plans. Ce n’est que lorsqu’ils peuvent se permettre d’engager des assistants que leur manga devient souvent beaucoup plus fourni et travaillé au niveau dessin.

Vinland Saga, de Makoto Yukimura. À gauche, un extrait du tome 1 ; à droite, du tome 21.

Visuel des personnages

Les personnages de manga en tant que tels ont eux aussi des codes visuels qui leurs sont propres. L’exemple le plus connu est sans nul doute les « grands yeux », popularisé par Osamu Tezuka. Ce dernier, précurseur du manga moderne, s’est inspiré de Disney et plus particulièrement des yeux de Blanche-Neige dans Blanche-Neige et les Sept Nains.

Gwendoline, de Yōko Hanabusa

Mais ces « grands yeux » sont loin d’être les seuls codes spécifiques aux personnages de manga. Ce ne sont d’ailleurs pas les seules parties du corps qui se retrouvent disproportionnées. La bouche, les dents mais aussi les bras, la tête et les jambes peuvent parfois prendre des proportions complètement absurdes selon l’état émotionnel du personnage ou ce qu’il est en train de faire.  

One Piece, d’Eiichiro Oda

On peut aussi parler de traits plus spécifiques : les yeux en croix (pour symboliser la mort ou l’évanouissement) ou qui prennent la forme d’un objet convoité (des dollars par exemple) ; la goutte sur la tempe (pour l’embarras ou la tension) ; les rivières sur les joues (pour les larmes) ; etc.

Ce genre de caractéristiques permet aussi d’apporter une touche d’humour dans le récit visuel. Il peut y avoir des contrastes graphiques frappants entre les scènes « sérieuses » et les scènes « légères » tirées d’un même manga.

Découpage, mouvements et onomatopées

Visuellement, le manga est aussi caractérisé par son utilisation à répétition de l’onomatopée. Non seulement elle lui permet d’illustrer un son ou un état d’esprit, mais elle contribue également au rendu global du dessin. D’ailleurs, les traducteurs français de manga choisissent souvent de conserver les onomatopées japonaises, quitte à indiquer leur sens en plus petit en dessous.

Fullmetal Alchemist, d’Hiromu Arakawa

En outre, le manga utilise souvent un découpage cinématographique, avec plusieurs « plans » sur une même scène, quitte à multiplier le nombre de cases. Lors de scènes d’actions, les mangakas n’hésitent pas non plus à dessiner des cases obliques pour renforcer cette impression de dynamisme.

Toujours dans la même veine, l’illustration de mouvements se fait souvent via l’emploi de lignes parallèles en arrière-plan, un effet que l’on retrouve dans certains comics américains.

Hunter x Hunter, de Yoshihiro Togashi

Mangas vs. webtoons

Si le webtoon reprend quelques codes graphiques du manga, il s’agit de supports de lecture qui n’ont rien à voir l’un avec l’autre. En termes de couleur, format, ou même sens de lecture, le webtoon ne ressemble en rien à son cousin japonais. En revanche, certains auteurs de webtoons s’inspirent beaucoup du visuel des personnages de mangas ; c’est une caractéristique que l’on retrouve par exemple dans unOrdinary, It’s Mine, Le Journal B&B d’Eiko à Paris… Ainsi que dans la plupart des webtoons d’auteurs japonais, tels que ReLIFE ou Comment élever une momie.

unOrdinary, d’Uru-Chan. On retrouve dans ce webtoon certains codes graphiques du manga.

D’ailleurs, si vous êtes à la recherche de webtoons japonais, n’hésitez pas à aller consulter nos autres articles sur le sujet !