Interview de Cloverloy, l’auteure de Black Horda

Par le 4 septembre 2020

Black Horda, c’est un webtoon canvas de la plateforme US de Naver, écrit et illustré par Cloverloy. On y découvre les aventures de Seth, un garçon capable de manipuler l’électricité. Il va se retrouver bien malgré lui mêlé aux affaires de la Horde Noire (Black Horda en vo), un groupe chargé de tuer des monstres appelés Slayers. Mélange d’action, d’humour et de surnaturel, Black Horda se démarque par la progression spectaculaire de son style (graphique et scénaristique). L’humour et la construction habile du récit, qui semble longuement réfléchie, en font aussi un webtoon assez unique sur Canvas. Aujourd’hui, Webtoon Planet part à la rencontre de son auteure, Cloverloy, pour une interview exclusive.

Cloverloy, tu es l’auteure de Black Horda, un webtoon style fantasy/surnaturel/action publié deux fois par mois sur la plateforme Webtoon de Naver. Dans une de tes FAQ, tu as déclaré qu’il s’agirait d’une série composée de quinze tomes. Nous en sommes actuellement au tome 3. Sur quel tome travailles-tu en ce moment ?

En ce moment je suis sur le tome 5 – chapitre 23, pour être plus précise. Compte tenu de la complexité de Black Horda, j’aime avoir beaucoup d’avance sur la publication. Comme ça je peux revenir en arrière et modifier des éléments scénaristiques si besoin.

Même si tu ne publies pas de chapitre toutes les semaines, travailler sur un tel projet doit te demander énormément de temps… (Merci d’ailleurs de consacrer ton temps personnel à nous offrir un webtoon aussi génial). Comment gères-tu tout ça ?

Comme j’ai beaucoup d’avance par rapport à la publication, je n’ai aucun souci à respecter les deadlines. C’est déjà un stress en moins. J’essaye aussi de publier chaque mois un peu moins que ce que je dessine, pour contrebalancer avec les moments où j’ai moins de temps que prévu pour travailler sur mon webtoon. Ça me laisse aussi le temps de participer à d’autres projets à côté, comme de l’animation, d’autres BD ou dessins… Changer un peu me permet de rester motivée. Ah, et puis récemment j’ai engagé quelqu’un pour m’aider à colorer les chapitres, afin de réduire un peu mon travail.

Que ce soit en termes de narration ou de dessin, la progression effectuée depuis les premiers chapitres de Black Horda jusqu’à aujourd’hui est impressionnante. C’est une des nombreuses qualités de ton webtoon. T’arrive-t-il de relire d’anciens chapitres pour les comparer à ceux sur lesquels tu travailles en ce moment ? Quelles sont tes impressions ?

Merci ! Et oui, je fais ça tout le temps ! J’ai commencé Black Horda quand j’avais 13 ans. Je n’avais aucune expérience dans l’écriture de BD, et je pense que ça se ressent très fortement dans le premier volume. À 15 ans, je l’ai redessiné, mais les premiers chapitres sont toujours imprégnés de ce côté shōnenesque « tête brûlée », que j’adorais quand j’avais 13 ans : d’ailleurs, à l’origine c’était comme ça que je concevais Black Horda. Au fur et à mesure, il a évolué vers un style dramatique plus centré sur les personnages, avec quelques combats ici et là, et je le préfère nettement comme ça. J’ai passé beaucoup de temps à bosser sur l’évolution des persos et la cohérence globale de l’histoire. Par contre mes personnages sont toujours aussi têtes brûlées. 😀

Pour ce qui est du dessin, ma progression est assez classique ; les premières pages n’ont rien d’extraordinaire mais il faut bien commencer quelque part. J’aime la direction qu’a prise mon style, et je continue à m’améliorer avec chaque chapitre.

Pourquoi avoir choisi de publier ta BD en tant que webtoon ? Est-ce que c’est le format qui t’a fait de l’oeil ? Le fait que tu puisses facilement communiquer avec tes lecteurs ?

À l’origine, Black Horda a été rédigé dans un format manga classique. J’ai toujours voulu publier mon histoire sur papier, mais la publication en ligne permet de se publier soi-même, sans avoir besoin de beaucoup d’argent, et ça c’est une opportunité unique. En plus, avec le format webtoon les auteurs peuvent directement intéragir avec leurs lecteurs, et lire leurs retours en direct. J’adore découvrir leurs théories sur la suite de l’histoire, ou les voir remarquer les petits détails de chaque épisode. Ce genre de chose n’existe pas dans l’édition papier. On est beaucoup plus « éloigné » de ses lecteurs.

Une fois que la publication webtoon de Black Horda sera terminée, penses-tu essayer de le publier en format papier ?

OUI ! En ce moment je suis en train d’adapter une partie du premier tome. Dès qu’il y aura assez de monde intéressé par le projet, je lancerai une campagne de crowdfunding pour éditer Black Horda en format papier.

Parmi tes sources d’inspiration pour Black Horda, y a-t-il des webtoons/mangas/séries/comics/films ? Lesquels ?

Un des tout premiers mangas que j’ai lu, c’est Pandora Hearts (Jun Mochizuki). Il a grandement influencé mon style de dessin et ma façon d’écrire. J’ai adoré la narration complexe de l’auteure, semblable à un puzzle. Après, je m’inspire un peu de tout ce que je lis/regarde. J’ai tendance à suranalyser ce que j’apprécie dans une histoire ou une oeuvre d’art et utiliser ensuite ce genre de réflexion pour mes propres récits.

Black Horda

En plus de Black Horda, tu travailles aussi sur d’autres webtoons plus courts (The Editor, The Madness We Call Our Homeland, The Monsters Next Door). Peux-tu nous dire un mot dessus ? D’où te sont venues toutes ces idées ? Est-ce que tu prévois de continuer The Monsters Next Door (actuellement en pause) ?

J’ai écrit The Editor et The Madness We Call Our Homeland pour les concours Webtoon de 2018 et 2020. Pour The Madness We Call Our Homeland, je me suis inspirée d’un dessin animé français (je crois) sur des enfants abandonnés. J’étais trop jeune pour vraiment comprendre un tel sujet quand je l’ai vu, mais ça m’a marqué, au point de constituer le point de départ de mon webtoon. Après, c’est très libre comme inspiration : on ne perçoit sans doute plus cette première influence.

The Monsters Next Door a été ma première tentative de BD en format webtoon. J’ai envie de le continuer mais j’ai aussi conscience de ne pas avoir assez de ressort niveau gags visuels pour écrire un comic humoristique. Pour le moment, je veux vraiment me concentrer sur Black Horda.

L’anglais n’est pas ta langue maternelle. Y a-t-il une raison particulière derrière ce choix d’écrire tous tes webtoons dans la langue de Shakespeare ?

Ma langue maternelle est l’allemand, mais de ce que j’en sais, il n’y a pas vraiment de communauté virtuelle allemande autour des webcomics (la dernière plateforme a disparu dans les années 2000). Pour moi, l’anglais est la langue la plus accessible à tous dans le monde. Si je m’étais cantonné à l’allemand et que je n’avais pas publié sur Webtoon US, je n’aurais sans doute pas rencontré tous ces lecteurs et créateurs de nationalité différente.

As-tu une idée de ce que tu veux faire après Black Horda ? C’est une histoire qui t’accompagne depuis des années (tu as commencé à travailler dessus à 13 ans). As-tu d’autres projets (webtoons ou autre) en tête ?

Il va me falloir encore quelques années avec que Black Horda ne s’achève – bien sept ou neuf, à mon avis (si tout va bien). Mais j’ai déjà une idée d’histoire que je veux dessiner après ça. Je préfère prendre le temps de planifier mes scénarios avant de commencer les illustrations, donc je pense commencer l’écriture quand j’aurais terminé le tome 8 de Black Horda (j’en serais alors à peu près à la moitié).

Black Horda

Pour l’instant, être auteure de webtoon est une passion, mais comptes-tu en faire ton métier ? Si la plateforme Naver t’offrait un contrat, serait-ce quelque chose qui t’intéresserait ou est-ce un domaine dans lequel tu ne veux pas travailler à part entière ?

Il faudrait que je vois le contrat avant de me prononcer mais pour le moment, ce n’est pas quelque chose qui m’attire du tout. J’aime prendre mon temps pour faire mes BD, tout simplement parce que je veux faire les choses bien. L’impression que j’ai quant à Webtoon, c’est que les éditeurs poussent un peu trop les créateurs à la quantité plutôt qu’à la qualité. Je comprends qu’il s’agisse d’un business, mais je ne veux pas y prendre part.

As-tu fait des études d’art ? Ou bien s’agit-il d’une passion que tu as développé par toi-même ?

Je n’ai jamais étudier l’art. Les écoles d’art sont malheureusement très chères et très inutiles, donc j’ai tout appris par moi-même. Et selon mon expérience, Internet est un bien meilleur professeur que n’importe quelle école d’art.

En guise de conclusion, y a-t-il des anecdotes que tu souhaiterais partager sur ton travail ?

Dessiner mes BD m’a énormément aidé à améliorer mon anglais et mes capacités en dessins. Illustrer une BD t’oblige à dessiner des trucs que tu ne dessines pas forcément en temps normal, comme les perspectives, les décors, etc. Ça m’a aussi permis de rencontrer des gens très sympas, avec qui je peux partager mes passions. Donc même si mon webtoon ne connaît pas de succès sur le long terme, ce travail m’aura offert plein d’opportunités vraiment incroyables.

Black Horda

Si vous avez aimé cette article, n’hésitez pas à jeter un coup d’œil à nos autres interviews d’auteurs de webtoons ! Et pour découvrir la série Black Horda, c’est par ici ! N’oubliez pas de commenter, de noter ou de laisser un j’aime à chaque chapitre : c’est gratuit et ça permet de conférer plus de visibilité aux auteures, qui peuvent ainsi continuer leur super travail !