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Manon Delabre, traductrice de webtoons

Par le 4 août 2025

Manon Delabre est traductrice littéraire spécialisée dans le webtoon. Elle travaille notamment au sein de l’agence Babel Gomme qui s’est spécialisée dans l’adaptation de contenus asiatiques comme les manhwas, entre autres.

Nous avons eu l’opportunité de lui poser quelques questions à propos de son métier dans l’univers des webcomics.

Bonjour Manon et bienvenue sur Webtoon Planet. Peux-tu nous parler de ton parcours avant d’arriver chez Babel Gomme ?

Manon Delabre : Bonjour ! Je travaillais déjà comme traductrice freelance depuis 2020. J’ai également occupé le poste d’assistante translation manager pour une plateforme de diffusion de webtoon. J’y assistais la manager dans ses tâches quotidiennes, comme la traduction et l’adaptation de contenus culturels et techniques, le suivi de projets, la coordination, la relecture, le contrôle qualité, les échanges avec les équipes coréennes pour assurer la cohérence des titres, l’encadrement de traducteurs externes, et parfois du recrutement aussi.

Wow ! Eh bien, tu n’as pas dû t’ennuyer ! Comment as-tu mis un pied dans ce métier ?

Manon Delabre : J’ai vécu six ans à Séoul, où j’ai appris le coréen et suivi une formation en traduction littéraire pendant deux ans à la KLTI (Korean Literature Translation Institute). En rentrant en France, je me suis lancée en freelance, et mon tout premier projet a été la traduction de webtoon. Et depuis, je n’ai jamais décroché.

Que fais-tu exactement au sein de l’agence Babel Gomme ?

Manon Delabre : Je fais exclusivement de la traduction. Principalement du webtoon du coréen vers le français, mais aussi du webroman. L’idée est de respecter au mieux le ton, le style et l’ambiance de l’œuvre originale.

Peux-tu nous décrire ta journée type ?

Manon Delabre : Je commence ma journée vers 8h30, avec un café (obligatoire !) et un coup d’œil à mes mails et mon planning. Ensuite, je me plonge dans la traduction pour différents clients, dont Babel Gomme. Ma plage de travail s’étend généralement jusqu’à 16h30, avec des pauses selon le rythme de la journée. La durée de mes journées varie en fonction de la charge de travail et des deadlines à respecter.

Tu travailles plutôt en solo ou en binôme ?

Manon Delabre : Toujours en solo. J’ai mes habitudes, mon rythme, et surtout mon style. Travailler à deux sur une même traduction peut vite devenir compliqué, parce que chaque traducteur a sa manière d’écrire, d’interpréter, et cela peut créer des incohérences. Échanger avec d’autres traducteurs est toujours enrichissant, mais travailler à plusieurs sur le même texte, ça peut vite faire perdre du temps (surtout quand les délais sont courts). Je suis plutôt perfectionniste, donc j’aime bien travailler seule et assurer un rendu final qui me ressemble à 100 %.

Qu’est-ce qui complique le plus la « webtoonisation » d’un titre ?

Manon Delabre : Adapter un titre au format webtoon, c’est pas juste copier-coller un texte. Il faut penser au rythme de la narration, aux bulles, au découpage… Un dialogue trop long peut vite casser le rythme. Et le ton doit être plus naturel, plus oral aussi. Parfois, il faut carrément revoir le style pour que ça colle mieux au format, ce qui peut être un vrai casse-tête quand l’original est plus littéraire.

Comment gères-tu les jeux de mots ou les références très locales ?

Manon Delabre : Pour moi, traduire, c’est adapter. Mon but, c’est que le lecteur français ressente la même intensité qu’un lecteur coréen. Quand une référence locale est essentielle à la compréhension ou à l’humour, je cherche un équivalent ou j’ajoute une note discrète. Mais j’évite autant que possible de sortir le lecteur de l’histoire. Pour les jeux de mots, j’essaie de trouver une idée équivalente en français. Et si vraiment ça ne passe pas, je préfère reformuler ou l’effacer plutôt que de faire un flop.

Comment se passe la collaboration avec les autres membres de l’équipe Babel Gomme ?

Manon Delabre : Super bien ! Chez Babel Gomme, la communication est fluide, rapide et bienveillante. Tout le monde est réactif, disponible, et fait en sorte que le travail se passe au mieux. C’est un vrai plaisir de travailler avec eux.

Comment vois-tu l’évolution du marché du webtoon en France ?

Manon Delabre : Le webtoon explose en France. Il y a de plus en plus de lecteurs, surtout chez les jeunes, qui apprécient le format digital, les histoires variées et le côté très accessible. Les plateformes se multiplient, et même les éditeurs papier s’y mettent. Mais le marché reste encore jeune comparé à la Corée. Il y a encore, selon moi, beaucoup à faire en matière de sensibilisation, de reconnaissance du métier, et de qualité des adaptations. Mais ça reste un secteur qui a de l’avenir.

Quelles qualités trouves-tu indispensables pour ton métier ?

Manon Delabre : Je dirais : une très bonne maîtrise des deux langues et cultures, source et cible, pour rendre un texte fluide, naturel et fidèle à l’original ; de la curiosité car certains projets abordent des sujets très variés (médicaux, historiques, etc.), donc il faut aimer chercher, comprendre et s’adapter ; de l’humilité car il n’y a pas de traducteur parfait. On apprend en continu, il faut savoir accueillir les retours, se remettre en question pour progresser et accepter que tout le monde n’aime pas notre style. C’est un métier en perpétuelle évolution, c’est ce qui le rend très intéressant.

Si tu devais expliquer ton métier à quelqu’un qui n’y connaît rien, que dirais-tu ?

Manon Delabre : J’aime bien voir la traduction comme un pont entre deux langues, deux cultures. Mon but, c’est que quelqu’un en France puisse lire une œuvre coréenne comme s’il lisait un texte écrit directement en français, sans jamais se dire que c’est une traduction. L’idée, c’est de faire passer l’émotion, le style, l’intention de l’auteur… tout en restant dans l’ombre.

Parfait ! Merci Manon pour tes réponses, et bravo pour tout ce que tu as déjà accompli dans l’univers des webtoons.